INSIDE THE DREAM LES SECRETS DE CRÉATION D’UN GRAND PARFUM, UN FILM DE MATTHIEU MENU

par | Nov 28, 2023 | ART & CULTURE, NEWS

Créer un grand parfum est un voyage aussi fascinant qu’intriguant, une aventure au long cours habitée tout à la fois par l’inspiration et l’introspection d’un créateur mais accomplie par une mosaïque de femmes et d’hommes aussi complémentaire qu’indispensable.

Curieux de percer le mystère, le réalisateur Matthieu Menu a approché le mythe J’adore à l’occasion de la première composition de Francis Kurkdjian en tant que Directeur de la création des parfums Dior. « Inside the Dream » orchestre une plongée lyrique et intime au cœur de la composition et de la fabrication d’une fragrance et relève le défi d’incarner l’évanescence d’un sillage. De Paris à Los Angeles, en passant par le Château de La Colle Noire, les champs de fleurs à Grasse ou en Inde, c’est un portrait choral où se croisent étoiles et créateurs, décideurs et mains expertes. Grâce à ce récit filmique inédit, un grand parfum parvient à naître en images belles et poétiques, traversées de questionnements et de révélations, de suspense et de sensations, d’émotions fortes et d’éclats soudains. « Inside the Dream » est un documentaire captivant qui pénètre dans les coulisses de la Maison Dior, au cœur même d’une aventure humaine où l’élaboration longue et patiente d’un sillage d’exception est portée par une quête commune du Beau.

Los Angeles, Intérieur Jour. La déesse Charlize Theron attend de rencontrer Francis Kurkdjian, le nouveau Directeur de la Création des parfums Dior venu lui présenter en personne sa vision et sa version du mythe, L’Or de J’adore. Au plus près des visages, fluide et nerveuse, la caméra capte toute la fébrilité et la grâce d’un moment rare, saisit l’énergie d’un créateur en pleine conquête. Rigoureux dans son approche, généreux par sa beauté formelle, le film va ensuite dérouler avec précision le récit d’une construction olfactive, d’une aventure humaine émaillée de doutes et d’illuminations, de discussions et d’intuitions.

Fil rouge filmique, Francis Kurkdjian se fait guide et invite à caler nos pas dans les siens au gré de sa quête créative. Une dramaturgie captivante qui nous fait « sentir » à ses côtés le jasmin sambac indien, ressentir son inspiration, cheminer dans la richesse incroyable des archives des parfums Dior. On croise sur sa route une mosaïque de femmes essentielles, celles qui composent son studio de création à Paris comme les productrices de fleurs à parfum partenaires des Parfums Dior, véritables héroïnes grassoises qui font refleurir la Provence. On y voit aussi, en pleine action, les talents d’une maison qui fait la part belle à la création visionnaire telle Maria Grazia Chiuri, à la tête des lignes de Couture et de Prêt-à-Porter, Calice Becker qui a donné naissance à J’adore en 1999, ou encore aux figures décisionnaires comme Véronique Courtois, Présidente Directrice Générale de Christian Dior Parfums.

Enfin, on y reconnaît les artistes qui ont contribué à l’aventure, comme le réalisateur Jean-Baptiste Mondino qui commente une saga en images qui appartient désormais à notre imaginaire collectif. Une parole forte, suivie de celle du designer Hervé Van der Straeten, père de l’amphore aux courbes de verre et au collier d’or qui ont su traverser les générations. Enfin, c’est l’artiste Jean-Michel Othoniel qui raconte avec émotion la naissance de sa dernière sculpture pour la fragrance, une fleur-écrin de perles d’or façonnée pour une fragrance qui l’inspire depuis des années.

Parfum-monde, fragrance totale, L’Or de J’adore se fait ici célébration et sésame en images pour comprendre et éprouver la lente et mystérieuse naissance d’un grand parfum. Des usines Dior près d’Orléans où surgit enfin la fragrance jusqu’au vernissage de l’exposition événement « Dior J’adore! » à Paris. « Inside the Dream » se faufile, touchant et agile, dans les interstices d’une création plurielle. Un film attentif et poétique qui incarne avec autant de délicatesse intime que d’envolées lyriques le mystère d’un sillage de légende.

 

 

INTERVIEW

MATTHIEU MENU, RÉALISATEUR DU FILM DOCUMENTAIRE « INSIDE THE DREAM »

 

« Inside the Dream » est votre second film documentaire consacré à l’univers du luxe. Pourquoi avoir choisi les parfums Dior et le parfum J’adore ?

Après avoir approché l’univers de la Haute Joaillerie, la création d’un parfum nous a interpellés. Comme la plupart des gens, je ne savais pas comment un parfum naissait, ni quelles étaient les étapes de sa création, le début, le déroulement et l’aboutissement de son histoire. Bref, un mystère total à percer, doublé d’un défi excitant pour un réalisateur : incarner en images un sillage qui est, par définition, invisible.

Comment avez-vous abordé la construction du récit en image d’un grand parfum ?

Ma démarche a été similaire à celle empruntée pour le premier volet d’« Inside the Dream » consacré à la Haute Joaillerie au sein de la Maison Bulgari. À savoir, partir d’une histoire singulière, d’un récit fondateur qui cerne avant tout une aventure humaine. J’ai voulu montrer la genèse d’un grand parfum tout en donnant accès au monde du luxe dans sa vérité. Ce film a pour dessein de restituer un cheminement créatif tout en captant une véritable sincérité. On y dévoile les doutes d’un créateur, sa quête exigeante et complexe tout comme la mosaïque de femmes et de d’hommes qui rendent possible l’existence d’un parfum. Il fallait restituer une certaine solitude créative associée à un travail collectif impressionnant, indispensable et synergique.

Comment s’est passée la rencontre avec Francis Kurkdjian ?

Nous avons approché la Maison Dior et sommes arrivés au tout début du processus de développement du parfum. Cette entrée en matière « chronologique » était parfaite pour rentrer dans l’histoire. Notre première rencontre s’est déroulée au Château de La Colle Noire qui a été le havre de paix de Christian Dior en Provence. L’âme de Christian Dior y est palpable, en particulier dans son jardin magnifique que nous avons voulu filmer comme une « respiration ». Francis nous a livré là-bas des paroles qui nous ont portés, guidés : « le lancement d’un grand parfum, c’est comme l’inauguration d’un paquebot ». Le ton était donné, il fallait qu’on envisage ce film avec autant de réalisme que de magie, qu’on entre à « l’intérieur » du processus de création pour tenter de lever le voile sur ce mystère. Nous avons pris le parti de le suivre pas à pas, dans le monde entier, en épousant les méandres de sa création, en faisant ressentir la pression énorme qui pèse sur ses épaules et la force qui l’habite. C’est un créateur en prise totale avec son époque, il n’est pas dans sa tour d’ivoire et, grâce à la relation de confiance que nous avons établie, il a accepté de se livrer avec beaucoup de facilité, de transparence et d’authenticité. Capter sa joie pure et sensorielle en Inde, lorsqu’il découvre les champs de jasmin sambac nous a été précieux. C’est un moment incroyable dans le film, où l’on ressent avec lui son bonheur et sa surprise de sentir les nuances et les facettes d’une fleur.

Et filmer Charlize Theron ? Pouvez-vous nous raconter cette expérience assez unique ?

Elle a été généreuse et naturelle. Cela se voit dans le film, elle est vraie. C’est ce que nous voulions à tout prix, capturer des moments sincères, fébriles où le stress est palpable mais où se mêle aussi le plaisir de la découverte. La séquence où elle essaye sa robe est particulièrement touchante, on y sent l’émerveillement intact qu’elle a à porter une robe Dior. Elle a un regard presque enfantin, d’une fraîcheur incroyable alors qu’elle s’admire dans le miroir.

Quelle a été votre démarche pour recueillir la parole des créateurs, Maria Grazia Chiuri bien sûr, mais aussi Jean-Baptiste Mondino, Hervé Van der Straten ou encore Jean-Michel Othoniel ?

La même démarche que pour tous les intervenants de ce film, à savoir chercher à restituer leur histoire singulière, leur récit personnel. Maria Grazia Chiuri a été très ouverte, généreuse, prolixe lorsqu’elle nous a raconté son rapport particulier au parfum. Mondino a été formidable aussi, facétieux et créatif, tel qu’on l’attend. Il voulait que sa parole l’emporte sur l’image ; son passage est marquant et la force de ses films pour J’adore n’en est que plus évidente. De même, les paroles du designer Hervé Van der Straeten et de l’artiste Jean-Michel Othoniel ont été décisives. Il s’agissait de coller à leur histoire propre pour donner corps à une émotion vraie.

Les images d’ « Inside the Dream » sont très belles, elles expriment toute la sophistication du luxe. Quels ont été vos choix pour parvenir à un résultat aussi esthétique ?

Notre but était de composer une image sur-mesure à la hauteur du luxe Dior. Pour ce faire, j’ai choisi des optiques très précises qui permettent un rendu d’image « poudré », très élégant. De même, le choix des caméras, du chef opérateur (qui vient du cinéma) a été fait dans le but d’une exécution de haute exigence. La musique, capitale à mes yeux, a également été composée par Dan Levy, ex-membre du duo The Do, qui ne travaille habituellement que pour le cinéma. Nous avons voulu le plus beau pour exprimer la dimension unique d’un grand parfum.

Pensez-vous qu’ « Inside the Dream » atteigne son but ? Qu’il nous fasse comprendre la naissance d’un parfum ?

L’objectif ultime était de donner envie de sentir ce sillage. Je pense que cette mission est remplie ! Si l’on plonge dans le détail de ce récit, on comprend qu’il convoque à la fois une dimension lyrique, qui exalte la beauté olfactive de J’adore, tout en dévoilant l’histoire « vraie » et réaliste de sa création. C’est un pas de deux entre l’univers d’un parfum et la découverte authentique de sa fabrication. Cette double entrée est destinée à créer du suspense, des climax intenses faits pour captiver les spectateurs. S’ils rentrent dans l’histoire et cheminent avec le film sur les pas du créateur, alors notre pari sera gagné.